lundi 11 mars 2013

EL CHANGUI

Le Changüí.

( réf : juliensalsa.fr,  furius.ca, wikipédia et youtube.com, merci à ces sites pour leurs recherches et accès à la culture, pour toutes corrections où si vous souhaitez ajouter des informations : ameetdependanse@gmail.com)

 Naissance du Changüí.

Le Changüí est né autour des années 1860 dans les raffineries de canne à sucre et les communautés rurales fortement peuplées par des esclaves de l'Oriente cubain, à Yateras, zone montagneuse de la partie nord de la province de Guantánamo. Il s'est aussi développé dans les villes du nord de cette province comme El Salvador ou Manuel Tames. C'est d'abord une musique de la montagne jouée durant les cumbanchas (fêtes paysannes durant lesquelles les familles se réunissent et vont de maisons en maisons). Les motifs de ces fêtes sont variés : un mariage, un anniversaire ou tout simplement l'envie de passer du bon moment et de le partager avec la famille ou des amis. Le mot Changüí signifie, à Cuba, danse ancienne des gens ordinaires et sert à désigner le style musical mais également la danse et les fêtes durant lesquelles le Changüí est dansé et joué.
 Province de Guantanamo


Les origines du Changüí sont assez confuses. Le Changüí vient sûrement de la structuration et de la "standardisation" des groupes de Nengón. En effet, le Changüí se caractérise plus par son instrumentation (qui le différencie par exemple du Nengón) que par une figure rythmique spécifique. Le Changüí a peut être également reçu les influences de la Regina et du Kiribá en aidant à l'incorporation de certains instruments. Au cours de son évolution, le Changüí a reçu les noms de Tunante, Maracaïbo et Capetillo.
Dans tous les cas, le Changüí combine de manière équilibrée des éléments et la structure de la guitare espagnole et les rythmes percussifs africains.

L'origine du mot Changüí est toute aussi confuse. Selon certaines études, le mot aurait une racine africaine bantú (Congo) car on peut reconnaître le nom de l'orishas Changó. D'autres avancent qu'il dérive du mot congolais "quisanguí" qui signifie danser ou s'amuser.

Parmi les plus grands représentant du Changüí, on peut citer Elio Revé Matos qui est, pour beaucoup, considéré comme le père du Changüí, bien que ce genre musical existait déjà avant qu'il ne le popularise. Sa formation, l'Orquesta Revé, communément connue sous le nom de El Charangon et crée en 1956, eut la bonne intuition de concevoir le Changüí comme un genre musical ouvert qui se laisse influencer par d'autres formes musicales ou d'autres rythmes pour donner naissance au Changüí-Son, Changüí-Merengue et Changüí-Rumba sur l'album "¡La explosion del momento!" gravé en 1989 et au Changüí-guaguancó, Changüí-Timba et Changüí-Pachanga sur l'album "¿De que estamos hablando?" produit en 2010.

Elio Reve Matos


D'autres types de mélanges ont aussi vu le jour comme le Changüí-Shake, aussi appelé Changüí-68, inventé lorsqu'en 1967 le bassiste Juan Formell entre dans l'Orquesta Revé et y injecte un son Rock. Au même moment, le Changüí-Ye-Yé apparaît et un peu plus tard, le Songo-Changüí.

 
Juan Formell

changui documental 1

changui documental 2
changui documental 3

Instrumentation

Les groupes de Changüí sont reconnaissables grâce à leur composition qui généralement regroupent 5 instruments principaux :
  • le tres, petite guitare à 3 cordes doubles ;
Changüí - Tres
Tres
  • la marímbula (instrument issu du mbira apporté à Cuba par les Bantú, appartenant à la famille des lamellophones et proche du Kalimba angolais). Elle sera ensuite remplacée par une vraie contrebasse ;
Changüí - Marímbula
Marímbula
  • les bongos ou bongos del monte, dépourvus de clés de serrage et dont les peaux sont accordées à la chaleur d'une flamme. Ils possèdent un son beaucoup plus grave que celui que l'on peut entendre dans les musiques Salsa actuelles ;
Changüí - Bongos
Bongos
  • le guayo (sorte de güiro en métal souvent crée à partir d'une râpe à légumes frottée avec une tige en fer) ;
  • les maracas.
S'ajoutent à cela un ou plusieurs chanteurs. De manière spontanée et irrégulière, une guitare, un cuatro ou de petites percussions comme un quijada (mâchoire inférieure de cheval, d'âne ou de mule frappée afin d'en faire vibrer les dents, ancêtre du vibra-slap) ou même un tabouret ou une bouteille en verre jouée avec une cuillère peuvent s'ajouter à la formation.

Changüí - Quijada
Quijada

Structure musicale

Le Changüí est plus sophistiqué, plus syncopé que le Nengón ou le Kiribá. Il est moins harmonique que le Son, style qui sera évoqué plus tard, mais joue sur une plus forte polyrythmie. Chaque chanson est divisée en 2 sections : l'exposition ou llamada réalisée par le tres ou parfois à l'unisson par les musiciens suivie du montuno pendant lequel le chanteur soliste improvise à partir d'un texte court qu'il va développer tout en alternant avec un chœur qui lui répond. Les sujets abordés dans le Changüí reflètent la réalité politico-sociale des paysans. Il peut aussi parler des femmes. En général, les changüiseros chantent en utilisant le quatrain. Selon le chercheur Alberto Muguercia, dans les régions centrales et occidentales de Cuba, les tirades utilisent le dizain alors que ceux de l'Oriente et surtout du sud, préfèrent le quatrain comme structure de prédilection.

L'instrument leader est le tres ; sans lui, il n'y a pas de Changüí. Le tresero suit la ligne mélodique du chanteur et renforce la structure harmonique tout en jouant de manière assez libre et improvisée, les pasos de calle ou pasacallos (qui vient du Pasacalle espagnol), ponctuations jouées à la dominante ou sous-dominante entre les phrases chantées. Il joue de manière très syncopée et "percussive". Il ne cesse jamais d'introduire des variations dans son jeu.

La marímbula joue le rôle de contrebasse et maintient un rythme régulier.

Le bongocero improvise sans discontinuité en privilégiant les sonorités graves et intensifie ainsi la polyrythmie du morceau. Il joue énormément sur de petites variations du rythme qu'il utilise comme base. Il utilise aussi des groupes de notes rapides appelées picao ou des sons glissés, les bramidos, pour renforcer la tension du morceau à son point culminant.

Le guayo, qui appuie les temps forts et les maracas conservent un rythme régulier qui va permettre aux autres instruments de s'exprimer.

Le tempo du Changüí est relativement élevé. Les temps forts sont très marqués. Le Changüí n'inclut pas de rythme de clave car il n'a pas encore été inventé.

changui de guantanamo